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André Legrand
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18 - L'EGLISE  DE  VAILLY-SUR-AISNE

18 - L'EGLISE  DE  VAILLY-SUR-AISNE

          L'histoire de cette église est marquée par les évènements suivants :

          Le premier est l'accession au titre de commune en 1123, évènement qui libère les énergies des villageois et qui correspond souvent avec la réalisation des édifices.

          Le deuxième, c'est l'augmentation des moyens dont va profiter la société du deuxième quart du douzième siècle, ce qui explique l'augmentation du volume des sculptures (chargées) qui ornent la façade.

          Le troisième, c'est la conception d'une église en croix latine, dont le plan très simple permet d'envisager, avec les connaissances qu'ils ont, la réalisation de voûtes sur croisées de nervures dans les collatéraux, mais pas dans la nef. Ce projet est certainement jugé comme irréalisable en 1125. A remarquer qu’en 1180, à Braine, les réalisateurs semblent n'éprouver aucune crainte à l'idée de réaliser une voûte sur plan barlong dans la nef. Cette remarque est suffisante pour justifier les propositions des dates de réalisation mais, continuons.

          Le quatrième, c'est la réalisation de baies en plein cintre moulurées datant des années 1125, environ.

          Le cinquième, ce sont les corniches moulurées, à comparer avec celles de Morienval (1125).

          Le sixième, c'est le coup d'arrêt que va initier Saint-Bernard, aux environs de 1137, pour demander la simplicité dans les édifices, concrétisé en 1151 par son manuscrit Instuta Générales Capituli, document qui serait détenu par la bibliothèque de Laon

          Le septième, ce sont les chapiteaux des colonnes engagées, dont la facture est en relation avec ceux du transept sud de la cathédrale de Soissons, datant, eux, de 1125 à 1140 (chapiteaux qui sont entreposés dans le transept nord de l'église de Vailly-sur-Aisne).

          Le huitième, ce sont les contreforts "à retraites" (ressauts ou redans, appelés : "retraites" par Choisy) typiques du début de l'architecture gothique dans l’Isle de France : 1124 à Morienval.

          Tout ceci pour proposer comme date de réalisation une plage allant de 1125 à 1140, ce qui fait de cette église un monument de notre patrimoine gothique.

          Les dates proposés par les archéologues pour la réalisation de l'église de Vailly-sur-Aisne sous l'évêché de N. de Chérizy (1180) obligent à comparer l'église de Vailly-sur-Aisne à Saint-Yved de Braine. Ces deux édifices n'ont aucun lien entre eux au niveau des techniques de réalisation et ne peuvent en aucun cas avoir été édifiés en même temps.

          Pour compléter l'article ci-dessus, je remarque que les articles du Dr Lécuyer, de M. Ribaux, ainsi que ceux d’Eugéne Lefebvre-Pontalis proposent, sans aucun fondement, de dater l'église de Vailly-sur-Aisne vers la fin du XIIe siècle. Or, à cette époque-là, des problèmes au sein du clergé sont tels qu'il y a de fortes chances de voir les membres du clergé se livrer à des mœurs dissolues auxquelles les évêques doivent remettre "bon ordre". Les évêques doivent s'occuper du clergé, ils n'ont pas à s'immiscer dans la construction des édifices (les églises) qui, bien que portant le même nom, sont deux entités distinctes, à tel point que si l'évêque est un tant soit peu intervenant dans la réalisation de la cathédrale, c'est le Chapitre de la cathédrale qui gère l'oeuvre (en tant que maître d'œuvre). C'est ainsi que lorsque Nivelon de Chérizy intervient parce que l'Eglise de Vailly-sur-Aisne "menace ruine", ce n'est pas du bâtiment dont il s'agit mais du clergé, parce que c’est de son ressort. Réponse faite à ceux qui confondent dans le terme "église" Bâtiment et Clergé; petite précision : si dans les églises on y dit la messe, l'Eglise sert aussi à toutes les assemblés et réunions pour les laïcs.

          Au temps des Capétiens directs, Jules Saincir nous précise : "On décerne un double nom aux cures. Elles s'appelaient "Eglise" lorsqu'il s'agissait des droits des laïques comprenant les oblations, et "Autel" pour tout ce qui regarde le spirituel". L'autel restait à la nomination de l'évêque et l'église appartenait à un Seigneur. Cette précision nous incite à penser que l'évêque ne peut donner d'ordre à un seigneur qui, dans le cas présent, serait représenté par une commune pour l'église qui menace ruine, mais il le peut vis à vis du clergé dont la ruine était morale, ce qui n'avait rien d'extraordinaire à cette époque.

          Une précision concernant les contreforts : les concepteurs prennent résolument le parti d'accuser la fonction de butée en substituant au parement vertical des contreforts un profil raisonné, un profil de fort empattement dont le relief décroît par des retraites successives. L'archéologue Choisy qualifie les contreforts à retraites comme étant gothiques, ce sont ceux que l'on peut observer, entre autre, sur les façades de l'église de Vailly-sur-Aisne, ce qui suggère que les croisées de nervures de l'église sont d’origine. La stabilité actuelle est évidente, elle l’était tout autant en 1125, lors de la réalisation.

          Quant aux baies en plein cintre, elles révèlent une datation précoce, mais pas trop, sinon, le décor de ces dernières seraient en bâtons rompus comme ceux de l'église de Condé-sur-Aisne, marquant le retour de la première croisade soit 1105/1110. C'est avec ces différentes précisions que je propose de dater l'église originelle de Vailly-sur-Aisne, entre 1125 et 1140.

          On est donc en présence d’une œuvre du début de l’architecture gothique, ce qui est remarquable.

          Une précision : Nivelon de Chérizy est nommé évêque le 19 août 1176. Quant à l'église de Vailly actuelle, a-t-elle été reconstruite à l'emplacement d'une église plus ancienne ou non, je ne le sais pas, par contre, elle était dédié à Saint-Michel et une rue s'appelle rue Saint-Michel. Existe-t-il des documents faisant état de fouilles?

          On pourrait parler du système constructif de l’église, des forces en présence et des systèmes de contre butée de ces dernières, cependant, la complexité de l'ouvrage entraînerait un long développement technique qui alourdirait inutilement.

Vailly : façade avec les contreforts à retraites prouvant la réalisation, dès l'origine, des voûtes sur nervures des collatéraux

Vailly : façade avec les contreforts à retraites prouvant la réalisation, dès l'origine, des voûtes sur nervures des collatéraux

Plan de l'église de Vailly-sur-Aisne

Plan de l'église de Vailly-sur-Aisne

Vailly-sur-Aisne : portail

Vailly-sur-Aisne : portail

Rose Léonard de Vinci

Rose Léonard de Vinci